Injection: fabrication d'une rampe

3/8/20

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L'auteur de cet article est notre ami Bernard, déjà auteur de  Notes sur la transformation d’un moteur 1600 en 1800 --par Nanard289.





Ayant déjà réalisé une rampe pour une R8 Gordini  ci dessus ( moteurs 1300) , il détaille ici la construction d'une variante pour moteur1600/1800.

Je le cite:

"C'est suite aux premiers résultats encourageants de ton boitier d'injection made in PhL que j'ai entrepris d'adapter une rampe disponible sur le marché pour permettre le développement de ton projet. L'idée étant de démontrer que l'on peut réaliser quelque chose de réellement performant en disposant d'un budget d'étudiant et d'une volonté de vouloir sortir des sentiers battus"


Il est donc prévu de piloter cette rampe avec le calculateur d'injection décrit dans  Injection pour Alpine 1600S.


La fabrication d’une rampe à injection avec un budget restreint peut se présenter comme un problème ardu à résoudre.

Pourtant, comme on va le voir, en fractionnant les différentes étapes de la réalisation, on se trouve à résoudre assez aisément un par un des mini-problèmes qui regroupés dans leur globalité pouvaient paraitre comme un obstacle insurmontable

1) Base de départ:
Pour éviter l'achat de pièces neuves qui sont souvent hors de prix (expression populaire sous-entendant que le prix de vente est en dehors d'un seuil raisonnable), j'ai dans un premier temps recherché sur le marché de l'occasion une rampe d'injection équipée de papillons d'un diamètre compris entre 42 et 44 mm. Ouvrons ici une parenthèse pour signaler que les vénérables rampes à guillotine qui n'ont que des inconvénients ont été systématiquement écartés de mes prospections. Parmi les inconvénients notables, signalons la fâcheuse tendance de la guillotine à rester coincée quand elle est grande ouverte et pour celles qui ont les injecteurs de montés en amont (la majorité des cas), l'essence se condense en ouverture partielle sur la guillotine et dégoutte (via le passage des billes) sous la rampe, ce qui est toujours préoccupant. Fermeture de la parenthèse.
Les motos modernes de grosses cylindrée (1300 cc et +) ont toutes une admission par injection papillon dont les diamètres correspondaient à ma recherche. Mon choix s'est donc porté sur les moteurs 4 cylindres en ligne du marché. Quelques préparateurs de moteurs de moto proposent des kits de transformation pour remplacer des boitiers de 42mm par des 43 ou des 45mm et revendent pour une centaine d'euros port compris, les anciennes rampes d'origines.Comme base de départ, j'ai donc fait l'acquisition d'une rampe de Yamaha 1300cc équipée de 4 boitiers papillon de 42,1mm.
Le première étape consiste à démonter entièrement la rampe pour désaccoupler les 4 boitiers Mikuni. Là, il faut le tournevis à frappe pour venir à bout des vis à tête cruciforme chère aux motocistes nippons.




Les boitiers papillons sont de fabrication Mikuni. Comme pour les carburateurs Weber ou Dell’Orto, les axes des papillons sont montés sur des mini roulements à billes.

 

Sur ce boitier qui constitue notre base de départ, on va ajouter devant un manchon en caoutchouc qui permettra de le fixer sur la pipe d’admission proprement dite, et derrière un cornet d’admission. Là, on ne lésine pas, on prend du neuf, mais pas n’importe où! Sur le marché asiatique on trouve le manchon à 2 € pièce (port et taxes incluses) et le cornet en aluminium anodisé à 7€.

Voici le premier maillon de notre rampe: l’assemblage d’un boitier papillon et son cornet !

 

Pour l’injecteur et son connecteur, je conserve celui d’origine qui était fournie avec la rampe d’occasion.

En continuant la progression, l’étape suivante consiste à fabriquer le tube de la pipe d’amission qui fera la transition entre le boitier papillon et la bride de fixation sur la culasse. Là, pour franchir cette étape, il faut posséder un tour ... ou bien avoir un copain qui en possède un!


Avec un outil à tronçonner, on va découper 4 morceaux de tube d’environ 90 mm chacun pour fabriquer les pipes d’admission qui vont supporter les boitiers papillons.

 

On va ensuite faire un épaulement sur chaque tube pour avoir un diamètre d’environ 41 ou 42 mm coté bride et conserver le diamètre de 50 mm pour le coté manchon. Le manchon étant équipé d’une lèvre d’étanchéité, il va nous falloir usiner une gorge pour permettre son encastrement.

 


L’épaulement fait, reste à usiner la gorge coté manchon




La lèvre du manchon a un profil assymétrique





Usinage de la gorge dans le tube de la pipe d’admission





Et bien voici le deuxième maillon de notre assemblage: on a ajouté le tube et son manchon.

 

Après avoir usiné nos 4 tubes d’admission, l’étape suivante consiste à assembler les quatre boitiers papillons ensemble pour constituer l’ossature de notre nouvelle rampe. Comme l'on s'en doute, l’écartement des conduits d’admission n’est pas le même sur un 1600S d’Alpine que sur un 1300 Yamaha! C’est là la principale difficulté à vaincre pour rendre compatible l’adaptation envisagée.

D’origine les 4 boitiers du Yamaha sont maintenus ensemble par deux profilés en L réalisés en tôle d’acier de 2 mm pliée. Sur le 1600S, l’écartement des cylindres étant plus important, notre rampe va donc être un peu plus longue et les profilés d’origine devront être remplacés. Pour cela, j’ai utilisé un seul profilé en L en alliage léger mais en 4 mm d’épaisseur.



A gauche, un des profilés en tôle d’acier d’origine. A droite le morceau de cornière en aluminium que je redécoupe et perce avec des nouveaux entraxes de fixation.

 

Sur la rampe d’injection du Yamaha, l’entraxe des boitiers papillons est de 79mm entre les cylindres 1-2 et 3-4 et est de 88mm entre les cylindres centraux 2 et 3. Sur le moteur 1600S de la Berlinette, les quatres cylindres sont régulièrement espacés de 89mm. C’est cette spécificité qui nécessite de refaire un nouveau rail support des boitiers papillons. Le second rail sera conservé mais sera installé uniquement entre les deux boitiers papillons centraux. Les trous de fixation seront simplement légèrement ovalisés pour passer de la cote 88 à la cote 89mm. L’ensemble gros rail alu plus mini rail acier (les fixations des cylindres 1 et 4 sur ce dernier ont été supprimées) reste suffisamment rigide. 


L’entraxe de fixation entre les boitiers papillons 1 et 2 est maintenant majoré de 10mm pour pouvoir s’adapter à la culasse du 1600S.



















Le nouveau rail support des boitiers papillons, découpé dans un morceau de cornière alu étant terminé, on peut procéder à l’assemblage de la rampe et prolonger les languettes d’accouplement des papillons.



En bas, le nouveau rail est un peu plus long que celui d’origine.



On démonte le levier d’accouplement mâle pour prolonger sa languette

La nouvelle languette sera découpée dans un morceau de tôle que l’on va plier et riveter pour faire une extension du levier d’origine



Détail du levier mâle modifié

L’extension du levier est ensuite coupée à la bonne longueur et il est remis en place pour régler et tester l’accouplement.




L’accouplement central (entre les papillons 2 et 3) ne présente aucune difficulté : la languette mâle (à droite sur la photo) a été très légèrement cintrée vers l’extérieur pour pouvoir passer de 88 à 89 mm d’entraxe.



Détail de l’accouplement entre les papillons 1 et 2.

Malheureusement, pour l’extension de la languette entre les papillons 3 et 4 ça ne sera pas aussi facile : le levier de commande n’est pas démontable de ce côté-là.






Sur le boitier N°3, le levier mâle est riveté sur l’axe du papillon et pour pouvoir le sortir, il faut démonter le papillon ! On va essayer de trouver une autre méthode pour lui rallonger le bout du nez car le démontage de l’axe n’est pas facile.




Finalement, la languette ajoutée sur le levier d’accouplement du papillon N°3 n’est maintenue en place que par un seul rivet ... et ça marche très bien aussi.




Pour sortir l’axe, il faut démonter le papillon et les queues de vis écrasées à la presse sont tout bonnement indémontables.





Les 4 papillons sont maintenant accouplés. D’origine, la commande des gaz se fait au centre par une commande desmodromique à cables (un cable tire pour l’ouverture et un autre tire pour fermer). Ce système est commun sur la plupart des motos modernes. Ici, je fais confiance au ressort de rappel et quand on ne tire pas pour ouvrir, ça se referme tout seul.



Dans cette nouvelle étape, nous allons aborder la partie la plus délicate de l’adaptation: la fabrication du rail porte injecteur avec ses supports.

D’origine, la rampe est moulée dans un alliage d’aluminium hypersilicié et est maintenue en place par deux colonettes dont la hauteur est ajustée pour garantir l’écrasement correct (ni trop, ni trop peu) des joints d’étanchéité des injecteurs. Cette pièce moulée n’est pas facilement modifiable (maintenant, les injecteurs ne tombent plus en face des trous). J’ai donc entrepris d’en fabriquer une nouvelle dans un morceau de profilé hexagonal de 22mm en dural (2017).




Pour faciliter l’usinage de cette rampe, j’ai décidé de la faire en deux morceaux séparés, avec au centre un accouplement coulissant pour les réunir.




La première version était avec 2 joints toriques sur la partie mâle.

La première difficulté consiste à percer de part en part les deux maillons qui vont constituer la rampe.


C’est après avoir cassé plusieurs forêts ‘’extra long’’ que j’ai décidé de faire la rampe en deux morceaux démontables!





La conception du support et sa fabrication m’ont bien occupé un après midi ... mais ne m’ont pas coûté grand chose !





La première demi-rampe avec son support est installée à la bonne hauteur (les joints des injecteurs sont correctement écrasés).


La fabrication de la seconde partie est un peu plus facile : La partie femelle de l’accouplement est simplement alésée et il n’y a pas de joint à installer.




L’alésoir diamètre 12 est installé sur la poupée mobile et on tourne très lentement.

 

Les constructeurs de motos ayant en général toujours le souci du poids, j’ai dans cet esprit allégé un peu les pièces de ma fabrication.



L’arrivée en essence se fait par un raccord 6-AN et le retour par un raccord plus modeste en 4-AN.

Comme on peut le voir, dans sa version finale la partie mâle de l’accouplement comporte 4 joints toriques.

Une fois installé, on a un ensemble compact, solide et élégant.

Le rail d’arrivée d’essence contribue à rigidifier la rampe dans son ensemble.




- Trucs et astuces d’usinage -

L’alésage des brides pour y emboiter le tube d’admission est une opération assez délicate si l’on veut obtenir une inclinaison fidèle qui soit dentique sur les quatre conduits.

Pour m’affranchir de cette difficulté, l’alésage du trou est fait au tour en fixant la bride sur le mandrin avec un agle de 10°. Le montage est un peu accrobatique mais le résultat escompté est facilement obtenu.

Sur la bride à aléser, on a préalablement tracé le centre approximatif du tube d’admission et on va positionner la bride pour que ce centre se trouve dans l’axe





On règle d’abord la hauteur de la bride pour aligner le centre du trou avec l’axe de rotation du mandrin. Ici, la bride est maintenue uniquement par deux mords; le troisième a été supprimé pour les besoins du montage.




Avec un niveau électronique qu’on a étalonné sur le banc du tour ...



... on va caler la bride à usiner pour quelle présente un angle de 80° par rapport à l’axe du mandrin.

On peut ensuite commencer l’usinage.

 

Le diamètre externe des tubes d’admission coté bride est de 42,02 mm

Les brides vont être alésées à 42,00 mm pour que le montage des tubes soit légèrement pressé. Le montage est fait en utilisant la poupée mobile qui va nous servir à pousser le tube dans son logement

L’emboitement du tube dans la bride se fait en force en utilisant la poupée mobile.



..  

On voit ici que l’angle d’une bride à l’autre est fidèlement respecté.


Bon, heureusement que c’est pas pour un V12!



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Le site de Bernard



Exemple de réalisations










Rampe Yamaha: elle posséde des trous de progression, comme sur un carburateur, et un système complexe de poussoir qui agit sur les correcteurs d'air!!
C'est bien compliqué...